Cycle de formation 2024 sous la direction de
Marie-Laure Dimon, Christine Gioja Brunerie et Anne-Marie Leriche
Le double se conçoit de multiples façons en psychanalyse. On peut l’approcher comme un autre même, comme un semblable, comme un double de soi, comme un fragment de la vie psychique… À l’origine de la vie, le bébé pré-conçoit l’autre comme un « autre subjectif virtuel » qui permet la création d’un espace de régulation de ses comportements mais encore un espace de re-doublement dans la mesure où cet autre, qui est aussi un objet primaire halluciné négativement, lui renvoie sa propre psyché naissante. C’est la fonction de miroir réflexif de l’objet primaire. Or, il existe des formes contemporaines de ce re-doublement, siège de la réflexivité (primaire ou même originaire), par l’intermédiaire de phénomènes d’externalisation et de projection dans les espaces de la virtualisation. Ces espaces virtuels offrent ainsi des fenêtres pour construire, même artificiellement, une réflexivité (ou pseudo-réflexivité), pour des sujets qui sont toujours aux limites de pouvoir créer des espaces de représentation de soi.
Incertaine, l’aventure humaine – sans cesse renouvelée et transmise – fait face au défi d’un monde en métamorphoses où les frontières s’effacent au profit d’un espace ouvert, interactif et fluide. Au sein de nos sociétés, les turbulences mondialisées comme les conflits armés et les nombreuses inégalités sociales entrainent un désenchantement généralisé. En s’engageant pleinement dans la société numérique qui propose un monde toujours de plus en plus intelligent, l’individu explore les univers parallèles et envisage alors des rêves plus utopiques qu’il pourra ré‑investir ou non dans la société selon son degré de conscientisation. Face à son miroir magique qui lui offre une réalité déformée et illusoire, l’individu fasciné s’évade et tisse des relations au monde vertigineuses. Dans sa quête d’affirmation de soi, il se construit une ou des identités numériques avec lesquelles il co-existe, circule à sa guise dans les strates spatio-temporelles et d’un clic évince tout obstacle à son plaisir. Libérant l’expression des imaginaires, la société numérique attise nos pulsions les plus enfouies et nous confère la puissance d’un pouvoir sans limites. L’enjeu pour l’homme planétaire que nous sommes devenu ne se nicherait-il pas dans sa capacité à entrevoir un certain équilibre dans les apprentissages critique et en partage ?